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Le droit de préemption, un nouvel outil

Le droit de préemption, un nouvel outil

Le droit de préemption a fait son arrivée dans le coffre à outils des municipalités en juin 2022 par son intégration au Code municipal du Québec et à la Loi sur les cités et villes. Mais en quoi cela consiste-t-il? Comment faire pour s’en prévaloir? Quels sont ses avantages, ses inconvénients et ses limites? Nous répondons à ces questions dans cette chronique. 

Qu’est-ce que le droit de préemption et comment l’exercer? 

Le droit de préemption est un droit de préférence accordé aux municipalités qui leur permet d’avoir la priorité sur l’achat de certains immeubles ou terrains, sur lesquels un avis d’assujettissement a été inscrit préalablement, afin de pouvoir y réaliser des projets liés à une fin municipale prévue. Ainsi, la municipalité peut égaler une offre d’achat soumise au propriétaire pour la vente de son immeuble, évitant qu’il soit vendu à un tiers sans qu’elle en soit préalablement informée. 

Précisons que les immeubles appartenant à un organisme public sont exclus de cette application et que certaines autres exceptions pourraient s’appliquer. 

Pour se prévaloir du droit de préemption, la municipalité doit s’assurer de respecter la procédure applicable qui se résume par : 

  1. L’adoption d’un règlement qui détermine le territoire sur lequel le droit de préemption peut être exercé ainsi que les fins municipales pour lesquelles des immeubles peuvent être acquis; 
  1. La notification d’un avis d’assujettissement de l’immeuble au propriétaire et l’inscription de cet avis au registre foncier. Cet avis ne peut avoir une durée de plus de 10 ans. 

Il est essentiel de suivre cette procédure pour pouvoir exercer le droit de préemption. De plus, un important travail de réflexion doit être fait, puisqu’un avis devra être publié pour chaque immeuble ciblé. 

Lorsque le propriétaire désire aliéner3 son immeuble, la municipalité reçoit un avis d’intention mentionnant le prix et les conditions de la vente projetée, cette dernière dispose alors d’un délai de 60 jours pour exercer son droit de préemption. 

Toutefois, dans le cas où l’aliénation soit faite au bénéfice d’une personne liée au propriétaire (au sens de la Loi sur les impôts4, par exemple d’un parent à son enfant ou d’une entreprise à sa filiale) ou d’un autre organisme public, la municipalité ne peut exercer son droit de préemption. L’avis d’assujettissement reste néanmoins inscrit au registre foncier pour les transactions futures. 

Droit de préemption et expropriation : des distinctions 

Le droit de préemption permet d’acheter un immeuble à un prix proche de la valeur marchande, car il se base sur le prix d’une offre d’achat acceptée. L’acquisition par voie d’expropriation, de son côté, prévoit une indemnité qui doit couvrir non seulement la valeur de l’immeuble selon l’usage le meilleur et le plus profitable (UMEPP), mais également les dommages directs causés au propriétaire. Cette distinction s’explique par le fait que l’expropriation force le propriétaire à se départir de son immeuble à un moment qu’il n’a pas choisi. Dans le cas du droit de préemption, la municipalité indique son intérêt, mais le droit ne peut s’exercer que si le propriétaire décide par lui-même de vendre son immeuble et que les conditions offertes lui conviennent. 

La municipalité qui décide d’exercer son droit de préemption a l’obligation de dédommager l’acheteur initial pour les dépenses raisonnables qu’il a engagées dans le cadre de la négociation du prix et des conditions de l’aliénation projetée, le cas échéant. 

Le choix de l’outil adéquat pour la municipalité repose donc sur ses besoins et sur son échéancier. En effet, l’expropriation permet de forcer la cession de l’immeuble à la municipalité dans un délai relativement court. Alors qu’il est possible que la municipalité ne puisse jamais exercer son droit de préemption et, par conséquent, qu’elle n’ait jamais l’occasion d’acquérir l’immeuble. 

Finalement, contrairement à la réserve pour fins publiques prévue à la Loi sur l’expropriation5 (qui prohibe, pour toute sa durée, les constructions, améliorations ou additions à l’immeuble visé à l’exception des réparations), le droit de préemption ne limite pas l’usage et la jouissance de l’immeuble par son propriétaire. En raison de cette importante limitation, la réserve ne peut être que d’une durée de deux ans, renouvelable pour deux années supplémentaires, et l’acquisition, sauf entente entre le propriétaire et la municipalité, doit se faire par expropriation. Il est également important de rappeler que l’imposition d’une telle réserve donne lieu à une indemnité se calculant d’après le préjudice que son imposition a directement causé. 

En conclusion, les municipalités disposent maintenant d’un autre outil à considérer dans la planification de leur développement et de leur besoin d’immeubles pour des fins publiques. Une analyse détaillée des besoins et des objectifs est essentielle afin de choisir la méthode à privilégier dans chacune des circonstances, les municipalités pouvant également opter pour une combinaison de celles-ci ou encore pour une acquisition de gré à gré. 

Pour un accompagnement personnalisé à ce sujet, n’hésitez pas à communiquer avec le Service d’assistance juridique àsaj@fqm.ca. Nous vous rappelons que les assurés du Fonds bénéficient de 4 heures de consultation annuelle sans frais.  

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Écrit par

Me Audrey St-James

Avocate, Service d’assistance juridique

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